Só China de Yonamine

Dans le travail de Yonamine (Luanda, 1975), l’interaction de moyens de production, exprimés par la façon de construire ses œuvres, rééquilibre la hiérarchie des références culturelles et des typologies sociologiques en une pratique cumulative qui se déploie au rythme de ses expériences  quotidiennes en tant qu’homme mondain, être cosmopolite qui reconnaît en lui-même la pulsion de communion et  d’appartenance au monde, quelque soit la latitude où il se trouve.

De Luanda – sa ville natale -  à Muyehlekete au Mozambique, à Cali en Colombie (2010), où il a été en résidence artistique et a commencé la série Tattoo You,  jusqu’à son plus récent passage par l’Orient sur la route  de l’Australie, Yonamine s’approprie des images, des gestes, des actions qu’il identifie à des signes de métissage ou d’ambivalence entre la fascination du colon pour le colonisé et ses manifestations culturelles, ancestrales et contemporaines, encapsulées dans un univers global fixé par la transition coloniale.

Cette conjonction de référents traduit une activité artistique prolifique et diversifiée, comme nous pouvons le voir dans les œuvres de cette exposition. Citons comme exemple les dessins réalisés à l’encre de chine sur du papier journal édité en Chine (ces journaux ont été une de ses premières impressions visuelles à son arrivée en Orient), ils ont servi de matière première à l’artiste pour mêler les dessins des tatouages et les scarifications corporelles (ces dernières sont une tradition des peuples aborigènes australiens, dont la pratique est maintenant interdite).

Une autre œuvre, CAN (de la série Tattoo You), qui représente les influences comme celles des Rolling Stones, de Jimmy Hendrix ou de Helio Oiticica), une installation vidéo par  laquelle l’auteur présente un orchestre de percussions dont la composition est marquée par le rythme des aiguilles à tatouer métalliques, révèle un intérêt pour l’incision sur le  corps1, que ce soit un tronc d’arbre scarifié d’Océanie ou des feuilles de coca tatouées. Il y a ici une étroite relation au corps, comme lieu de signification ethnique, morale et économique, dans le sens où le corps est l’agent de la manufacture et simultanément le lieu du risque, du marché,  la matière docile et sensorielle de n’importe quelle célébration initiatique.

L’exposition « SÓ CHINA»  représente une étape de plus dans son travail de terrain, comme une expérience disséminée à travers des contextes divers, qui concentre ses méthodes de production et de réflexion, tout en laissant sans limite les procédés et les décisions testés dans l’espace exposé, dans le sens où cela est, au plus, un autre moment d’expérimentation et de confrontation.

Inaugurée le 22 Mars, Exposition visible jusqu’au 9 Mai 2012.

Galerie Cristina Guerra [Rue Santo Antonió à Estrela, 33. 1350-291 Lisbonne І Portugal].


  • 1. Comme, par exemple, dans l’œuvre de l’artiste Catherine Opie, qui, dans l’autoportrait de 1999, montre sur son dos quelques dessins d’enfants réalisés avec une lame et un tatouage en forme de serpent sur le bras droit.
Traduction:  Véronique Daudrix

par João Silvério
Cara a cara | 2 avril 2012 | angola, art contemporain, yonanime